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Sun - Soleil noir

Pas besoin de choisir entre Courtney Love et Erik Rutan, ni entre power trio et robe à volants… Karoline Rose SUN fait tout, à sa manière. Chanteuse, guitariste, compositrice, productrice, elle revendique un son qui cogne autant qu’il caresse, avec un jeu très personnel, deux amplis, peu d’effets… Mais beaucoup d’instinct. Rencontre avec une artiste qui a pris son temps pour se dévoiler sur un premier album, « Krystal Metal », qui sait pourquoi, et surtout pour qui elle joue.

« Krystal Metal », c’est un album que tu as mis du temps à sortir. Volontairement ?

Karoline Rose SUN : Oui, complètement. Je suis artiste indé, j’ai sorti deux EPs avant, et je voulais que l’album arrive quand j’aurais une vraie équipe autour. C’est mon bébé, je l’ai mûri, produit seule, de A à Z. Il y a des titres que je traînais depuis longtemps, que je voulais défendre dans de bonnes conditions, et d’autres que j’ai écrits sur la route. J’ai profité du confinement pour ciseler tout ça. Et j’ai écrit pas mal de choses sur la route aussi pour cet album, notamment le morceau Krystal Metal lui-même, d’ailleurs. Il est venu comme ça sur la route…

Ce mélange, comme tu le définis si bien, de brutalité et de pop, tu l’assumes depuis toujours ?

Oui, c’est même mon ADN. À 12 ans, j’étais en Forêt-Noire, au fin fond de l’Allemagne, seule avec ma mère. Elle était veuve et moi un peu sauvage, mais elle m’a toujours encouragée. J’avais la guitare de mon frère, des bouquins, et une obsession pour la main droite. C’est venu de là, avant même de savoir qui étaient James Hetfield ou Robb Flynn. Les gens ont toujours essayé de me faire choisir un camp. Mais quand un mec comme Andrew Scheps (Metallica, Beyoncé, Smashing Pumpkins…) t’écrit pendant le confinement pour te dire que tu dois produire toi-même, tu l’écoutes. Et tu fonces ! Il m’a trouvé sur Instagram. On a commencé à parler et c’est lui qui a mixé des titres sur mon deuxième EP et qui m’a dit : « En fait, c’est toi qui dois produire et vas-y, c’est ton truc, fais-toi confiance… » C’est génial ! Et c’est marrant parce que, tu vois, il a fait ça à l’œil, par passion.

© Jean-Pierre Sabouret
SUN en ouverture du Hellfest © DR

Pas de chance, au moment où tu te lances, effectivement, le monde s’arrête…

Oui, le truc insupportable ! Un premier EP qui sort et, quelques mois après, tout s’arrête. En plus, j’étais en train de tourner un film avec Tony Gatlif à Arles et tout (« Tom Medina », pour lequel elle a signé cinq titres, NDR)… Mais boum, le confinement ! Et j’ai eu le covid quatre fois, tu vois… Alors que je suis triple vaccinée. Mais je les ai tous chopés. Ça a été une période difficile pour nous tous.

Une artiste seule à la guitare dans ce registre, ça ne court pas les rues…

C’est mon instrument, c’est aussi comme ça que je chante le mieux. J’ai toujours composé à la gratte, et j’ai un jeu un peu chelou, entre metal rythmique et electro. J’imitais les arpégiateurs à la main. J’ai un power trio avec basse et batterie, c’est très organique. Si j’avais eu besoin d’un deuxième guitariste, je l’aurais pris. Mais là, ça marche comme ça, c’est naturel. Je suis franco-allemande, j’habitais en Forêt-Noire, en Allemagne, et il n’y a rien en Forêt-Noire ! Tout ce que j’avais, c’était la guitare metal. Parce qu’en fait j’avais accès à la guitare de mon frère. J’avais plein de livres, des méthodes de guitare metal, mais, en fait, j’ai une main droite, c’est ça ma spécialité. Donc j’ai vraiment tout de suite été sur la main droite, la main droite, la main droite ! J’ai développé ce jeu et, en même temps, j’étais quand même encore une petite fille. J’écrivais des chansons, des petites chansons. Avant, c’est vrai, ça a commencé par Courtney Love, ou encore L7, avec Donita Sparks, la meuf de Kitty (Kathryn-Leigh Beckwith)… Et, ensuite il y a Robb, Flynn, Machine Head, jusqu’à Erik Rutan, Hate Eternal… De l’autre côté, j’ai aussi la culture At the Drive-in, cette approche un peu indie ou Sleater-Kinney… Ça a créé un peu des choses hybrides. Je ne me disais pas que c’était étrange ou pas. C’était comme ça, jusqu’à ce qu’on me le fasse remarquer. Et pendant des années, là, on me disait : « Ouais, faut choisir ! » Et ce truc de power trio, d’avoir un bassiste et un batteur avec moi, c’était assez évident (Bassem Ajaltouni, basse, claviers, Loris Larosa, batterie, NDR). Je me suis dit : « Mais oui, ça marche tout seul ! » Et si j’avais eu un besoin d’un autre guitariste, je l’aurais ajouté.

Tu as aussi fait de la scène dans un tout autre registre…

Oui. Avant de vivre de ce projet, il fallait bien manger. J’ai chanté dans « 1789, Les Amants de la Bastille », au Palais des Sports, tous les soirs. Et j’ai joué Édith Piaf dans une comédie musicale (« Piaf »). Grâce à elle, j’ai fait mes heures, appris la scène, appris le métier. J’ai même repris Jezebel sur scène, un hommage. Il y a Anna Calvi qui l’avait faite aussi. Piaf m’a fait vivre, au sens propre. Et j’assume totalement, parce que c’est quelque chose qui m’a appris le métier et tout. Mais, ce n’est pas du tout la même façon de chanter et de jouer.

En parlant de reprises, ça peut donner quoi ?

Toujours. Survivor de Destiny’s Child, I Follow Rivers de Lykke Li. J’aime les chansons, peu importe le style. J’ai un respect énorme pour Lady Gaga, pour sa culture rock, son amour du metal. Comme moi, j’aime aussi la pop ou le rock, ça va de Black Sabbath jusqu’aux Beatles, ABBA… Ce sont des gens qui ont écrit de vraies chansons. C’est ce que j’essaie de faire, moi aussi. Juste des putains de chansons.

Et le look pas vraiment rock and roll et encore moins death metal, c’est un parti-pris, j’allais dire militant, ou juste toi ?

Juste moi. À 5 ans, je faisais des crises pour aller à l’école en robe. J’ai toujours eu cette « direction artistique », ce n’est pas réfléchi (rires). Ma mère n’en pouvait plus, parce que je leur faisais des crises de nerfs. J’étais là : « Moi, je vais à l’école comme ça ! » Je n’aime pas l’affrontement, je suis douce, mais j’ai du caractère. Et pourquoi je vais me mettre avec un jean ? Comme Courtney Love, qui assumait tout, moi, j’aime ça, les licornes, le rose… Et Erik Rutan en même temps. Ça choque ? Tant pis.

Une guitare UniCut sur mesure. © DR
Avec sa « mignonne » Squier Hello Kitty. © Jean-Pierre Sabouret

Parle-nous de tes guitares, notamment de cette UniCut que tu as entre les mains…

Alors ça, c’est une histoire géniale. À la base, je suis avec Fender qui m’envoie des guitares, mais ce n’est pas un contrat exclusif. Ils me fournissent des grattes qui me correspondent. Donc, en général, chez eux c’est les Telecaster Deluxe, avec les gros micros, pour avoir vraiment le lard et tout ça. Et ils m’avaient notamment envoyé la American Pro II Deluxe et c’était très bien. Mais un jour, je suis en tournée à Munich. Et là il y a un gars qui m’aborde : « Bonjour, moi, je suis luthier. » Je lui réponds : « Ok, bien sûr, quoi d’autre ? » Et il me dit : « Je te fais la guitare que tu veux ! » Je lui dis : « C’est combien ? Moi, je n’ai pas trop les moyens… Je suis chez Fender, je ne vais pas m’acheter des grattes. Je suis bien là où je suis, tu vois ? » Il me dit : « Non, non, mais je te la fabrique. J’adore ce que tu fais, je te fais ça gratos ! » Je réplique : « Ok, alors d’abord je suis mariée et tout (rires). » Et le gars, Florian, insiste : « Ben, vas-y, regarde… » Donc j’ai regardé un peu ce qu’il faisait et j’ai vu qu’il était dans la place, il faisait des salons de guitares et tout ça. Et il a fini : « Je te fais ta guitare, je te l’envoie. » Je lui ai dit un peu tout ce que je voulais. Il a conçu ma guitare et on l’a présentée ensemble au Salon de la guitare à Mannheim, le Guitar Summit, l’année dernière. Donc j’étais trop fière, je n’y croyais pas. Ce gars, il m’a vraiment fait ma gratte parce qu’il a kiffé ce que je fais. Une guitare assez légère avec tout ce que j’aime, pas beaucoup de potards, une touche très agréable, un manche très confortable, des micros doubles qui sont très près des cordes, parce que j’ai besoin d’avoir du high gain. Sinon, j’ai quand même des belles guitares custom, et quelques jolis bébés. Mon tonton, Mick Piellard, a joué un petit temps dans Ange et il m’a légué quelques grattes. Dont une super Strat Squier… Mais UniCut, c’est mon bébé de live. Depuis, ils ont fait des Squier Hello Kitty, chez Fender et ils m’en ont envoyé une, là. Bon oui, elle est jolie. C’est le look, c’est mignon (rires)…

On termine ce tour d’horizon matos avec tes amplis et effet ?

Sur scène, j’ai deux amplis : un Line 6 Spider 112 pour le tranchant metal, et un Hughes & Kettner Tube 50 pour le rock plus nuancé. Je cherche un équilibre, un son qui respire. Côté effets, alors, là, c’est le strict minimum. En live : RC Booster (Xotic Effects), POG (Micro POG Electro Harmonix) et basta. Pas de delay, pas de reverb. En studio, je joue dans trois amplis en simultané, dans des pièces différentes. Pas trop d’overdubs, je veux que ça sonne live, direct. C’est du brutal pop, pas un plan marketing.

Effectivement, ton son reste accessible, on pourrait même dire qu’il peut convaincre un public assez large…

C’est ce qu’on me dit souvent. Aux États-Unis, on trouve ça « mainstream et indie à la fois ». En France, on me reprochait que ce soit… justement ça ! Mais j’ai arrêté de calculer. Mon public est à mon image : multiple, ouvert, un peu cour des miracles. Des enfants en robe de princesse, des metalleux en T-shirt Hate Eternal, des filles en mode licorne… J’adore ça ! Un jour, quelqu’un m’a dit : « Ouais, c’est quoi ce truc de marketing Brutal Pop ? » Et j’ai répondu : « Non, mon label c’est moi et mon manager (Bassem), on est que deux. Ce n’est pas un truc de marketing. »

Article paru dans le numéro 371 de Guitar Part.

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