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MASTODON - Double dose

Pour son huitième album studio, Mastodon a mis les bouchées doubles. « Hushed And Grim » est un pavé monumental de presque 1h30 de musique et de 15 titres, qui résume parfaitement l’évolution du quatuor d’Atlanta tout au long de sa carrière et sa volonté de toujours se renouveler.

Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à faire un double album, le premier de votre carrière, plutôt qu’un simple ?
Bill Kelliher (guitare)
 :
En raison de la pandémie et des différents confinements, nous nous sommes retrouvés avec plein d’idées et de riffs. Au départ, nous devions enregistrer douze morceaux afin d’avoir le choix de n’en retenir que neuf pour l’album. Et avoir du choix, c’est toujours mieux pour élaborer la tracklist finale, car c’est ce qui va définir la dynamique d’un album. Mais après avoir mis en boîte les douze titres, il nous a été impossible de trancher. Nous en avons donc sélectionné trois autres parmi les vingt-cinq que nous avions composés en amont. Nous n’avions jamais fait de double album auparavant alors que l’envie a toujours été présente, et le concept de ce disque – paroles et musique comprises – nous a poussés à aller jusqu’au bout. Disons que tout était réuni pour sortir un tel album.

Le fait que vous ayez dorénavant votre propre studio d’enregistrement a dû également jouer quant au choix de réaliser un double album, non ?
Grâce au West End Sound, un studio dont je suis le copropriétaire, tout a été fait sans précipitation et sans timing imposé du genre : « vous avez quatre semaines pour tout finir ». Nous avons ainsi pu prendre notre temps pour explorer chaque idée, chaque riff que l’un d’entre nous proposait. C’est sans doute l’expérience studio la plus détendue que nous ayons jamais eu. Autre point important : j’ai un home-studio bien équipé, ce qui nous a permis de travailler déjà en profondeur les premières démos. Puis, nous avons passé quatre semaines avec David Bottrill (le producteur de « Hushed And Grim », ndlr) pour préparer le terrain avant l’enregistrement. Autant te dire que nous étions prêts comme jamais lorsque nous avons commencé les prises !

À l’heure du streaming et du découpage de la musique à outrance, n’est-ce pas un peu fou de vouloir faire un double album de 15 titres pour environ 88 minutes de musique ?
Que veux-tu, on ne se refait pas (rires) !  J’ai aujourd’hui 50 ans… J’ai découvert la musique avec l’envie d’écouter des albums, grandi avec cette culture du vinyle, comme la plupart des gens de ma génération. Je me fous totalement du streaming, même si je trouve que l’idée est plutôt bonne à la base. Mais c’est une autre histoire… Bref, je me souviens quand j’allais dans un magasin de disques, j’y passais des heures à éplucher les pochettes, à regarder les visuels, les notes, les paroles et les photos à l’intérieur. Et c’est encore de cette manière que nous concevons, avec Mastodon, la découverte d’un disque. Et nous n’allons pas changer notre manière de voir les choses parce que le streaming est plus populaire de nos jours. Je crois sincèrement qu’il y a encore beaucoup de personnes qui pensent comme nous et perpétuent ce genre de « tradition ».

Quelles sont les règles à suivre pour qu’un double album soit consistant du début jusqu’à la fin ?
C’est une excellente question (rires) ! Faire un double album, cela ne se décide pas comme ça, juste avec cinq ou six chansons, et en faisant du remplissage ensuite. Quand nous avons pris notre décision, nous avions déjà quinze morceaux prêts, des paroles aux structures, en passant par les solos et les arrangements. Nous avions ces chansons que nous trouvons tous excellentes et qui font que l’ensemble a du sens et qu’il y a un lien qui les unit. Nous ne pouvions pas faire autrement que de sortir un double album. Enfin, si… Nous aurions même pu réaliser un triple tellement nous avions de chansons en stock. Nous avons enregistré ce disque comme s’il pouvait être le dernier d’une bande de potes…



© Clay McBride



On a l’impression que « Hushed And Grim » synthétise parfaitement votre évolution musicale depuis ses 10 ou 15 dernières années…
Avoir notre propre studio a rendu les choses plus faciles, car chacun pouvait y aller quand bon lui semblait pour composer ou tout simplement essayer une idée qu’il avait en tête. Au final, cela donne un disque très varié, avec des moments purement rock’n’roll, des passages presque southern-rock, des gros riffs… Alors oui, il y a dans « Hush And Grim » des petits éléments de chacun de nos albums précédents, mais avec une approche différente. Nous jouons ensemble depuis tellement longtemps que nous sommes capables de prendre du recul quand nous composons des nouveaux riffs. Si ça sonne trop comme quelque chose que nous avons déjà fait, nous changeons le rythme, la tonalité ou même les notes pour arriver à quelque chose d’unique.

Avant sa sortie, tu as décris « Hushed And Grim » comme étant l’album le plus complet et le plus massif au niveau du son que vous ayez jamais fait. Penses-tu que c’est aussi le plus collaboratif ?
Je répondrai bien sûr oui à la première affirmation… et non à ta question (rires) ! Nous sommes tellement fiers du son de l’album et moi de celui des guitares. Bon, j’avoue que je suis un vrai nerd quand ça touche au son des grattes et à l’équipement. Pour ce qui est de l’aspect collaboratif, c’est sûr que chacun s’est plus investi dans la composition que précédemment… Mais bon, ça n’est pas facile de nous réunir dans une même pièce pour jammer pendant des heures et composer. Personnellement, je préfère trouver des riffs de mon côté, les faire tourner avec Brann (Dailor, le batteur) et assembler le tout avant de le proposer aux autres. Comme je le disais précédemment, tout le monde a mis la main à la pâte. Oui, c’est en quelque sorte un album collaboratif… mais à notre manière.

Tu as dû pas mal changer ton choix de guitares selon la nature des morceaux…
J’ai beaucoup joué sur des Gibson Les Paul de la fin des 70’s/début des 60’s. Chaque guitare est équipée de différents micros. Brent et moi avons joué, ce qui est assez nouveau, sur des guitares Banker (https://bankerguitar.com) construites par Matt Hughes. Il habite à Atlanta, pas loin de chez nous et franchement, ses modèles sont bien meilleurs que certaines Gibson… Mais la guitare principale sur cet album, c’est ma Sparrowhawk (modèle signature de Bill chez ESP/LTD, ndlr). J’en ai plusieurs, également équipées de micros différents. J’ai récemment travaillé avec Mojotone pour élaborer mon propre micro dont le nom est un clin d'œil à une chanson que je jouais avec un de mes anciens groupes… Tu es le premier à qui je dis ça ! Il devrait figurer sans doute sur mon prochain modèle signature chez ESP. J’ai aussi utilisé des Telecaster et des Stratocaster. Je ne suis pas un habitué de Fender, mais pour certaines ambiances plus country, c’était parfait.





Trois invités sont présents sur « Hushed And Grim » : la mère de Troy Sanders au cor, Kim Thayil de Soundgarden et Marcus King. Bill Kelliher nous en dit plus sur ces collaborations.
« Brent a un jeu très bluesy et il a souvent été à Nashville pour jammer : il adore faire des solos. Il est ami avec Marcus depuis un bout de temps et il lui a proposé de passer au studio pendant l’enregistrement. Ils ont un jeu de guitare assez similaire… D’ailleurs, quand j’écoute Gobblers Of Dregs, un des titres sur lequel il joue (on retrouve également le bluesman sur The Beast, ndlr), il m’est très difficile de dire qui fait telle ou telle partie ! Quant à Kim Thayil, il est une de mes plus grandes influences en tant que guitariste quand j’étais plus jeune. Lorsque j’ai découvert Soundgarden, j’ai été complètement époustouflé par ce mélange de punk rock, de heavy metal et de rock’n’roll… Tout ça pour un seul groupe ! Kim a fait le solo de Had It All, une chanson qui parle du ressenti qu’on peut avoir après la perte d’un proche. Cela fait référence à notre ami et manager Nick John (décédé en septembre 2018 des suites d’un cancer du pancréas, ndlr), mais ça nous évoquait aussi ce qui est arrivé à Chris Cornell. Et tu peux vraiment sentir toute l’émotion que Kim a mis dans ce solo… Troy a toujours voulu que sa mère joue du cor sur un album de Mastodon et il n’y avait pas de meilleur choix que ce titre pour que son souhait se réalise. C’était sincèrement un bel hommage. »

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